dossier élection 2024

A. Maron : « Mettre en œuvre la transition juste »

Le ministre écologiste bruxellois aborde avec nous le bilan de son action ainsi que les priorités d’Ecolo pour la nouvelle législature régionale.

A. Maron : « On a drastiquement renforcé les moyens mis à disposition du secteur social/santé bruxellois. »
A. Maron : « On a drastiquement renforcé les moyens mis à disposition du secteur social/santé bruxellois. »

« Comme le dit Zakia Khattabi, notre tête de liste aux prochaines élections régionales, la question climatique et environnementale est la question sociale du siècle. C’est en tous cas l’une des questions sociales du siècle ». Le ton est donné. Alain Maron revendique le fait d’avoir conçu ses politiques en posant l’objectif de justice sociale parallèlement aux objectifs environnementaux et climatiques. « L’un ne se fera pas sans l’autre », précise-t-il. Étant à la fois ministre bruxellois de l’Environnement et du Climat, mais aussi ministre de la Santé et de l’Action sociale, il a également pu aborder dans son mandat ces thématiques d’une façon spécifique.

Mais, concrètement, où en est la réalisation de ces objectifs à Bruxelles, par exemple, pour l’amélioration de la performance énergétique des logements donnés en location ou en matière de sans-abrisme ? Qu’est-ce qui a été fait ? Quels sont les problèmes rencontrés et comment propose-t-il d’y remédier ? Le ministre n’hésite pas à pointer les responsabilités politiques de certains blocages, à commencer pour le sans-abrisme par «  le refus de toute régularisation, qui est une pure position idéologique de droite, non exempte de certains relents racistes » ou concernant l’amélioration de la performance énergétique des bâtiments (PEB) des logements donnés en location, les difficultés d’avancer du fait de « certains partis qui sont opposés à l’idée de grilles de loyers, estimant que le marché s’autorégule de façon optimale par son libre jeu. »

Le Médibus offre des soins gratuits aux personnes qui vivent dans la rue.
Le Médibus offre des soins gratuits aux personnes qui vivent dans la rue.

Ensemble ! : Au terme de cette législature régionale, quels sont les éléments les plus saillants de votre bilan ?

Alain Maron : En 2019, Ecolo avait négocié un accord de majorité bruxelloise qui comportait de nombreuses mesures en faveur d’une transition écologique et climatique juste. Il s’agissait de relancer et de structurer la politique climatique et de biodiversité de la région, qui avait été mise en pause sous la législature précédente, en veillant à une mise en œuvre socialement juste. Cette relance est aujourd’hui chose faite, sous mon impulsion. Un des points centraux a été de structurer ces politiques et de les inscrire dans des ordonnances qui prévoient, par exemple, que la région doit atteindre une réduction des émissions de gaz à effet de serre de 47 % d’ici 2030 et la neutralité carbone d’ici 2050. L’ordonnance climat instaure également un comité d’experts indépendants, chargés de rédiger et rendre public annuellement un rapport d’évaluation de la mise en œuvre de ces objectifs climatiques et de biodiversité, et ce pour l’ensemble des compétences du gouvernement bruxellois. Pour réaliser cette transformation sociétale majeure en permettant une participation des personnes, nous avons également créé une Assemblée citoyenne permanente pour le climat, constituée sur la base d’invitations à la participation directe envoyées à 10.000 personnes tirées au sort. Ce processus a abouti à la réaction de recommandations adressées au gouvernement, auxquelles il est tenu de répondre de façon circonstanciée. Toutes nos politiques environnementales sont concertées. C’est notamment le cas pour la politique de rénovation et d’isolation du bâti « Rénolution », qui a mobilisé les moyens les plus importants. Beaucoup de moyens supplémentaires ont été dégagés pour aider les personnes, les pouvoirs publics et les PME à améliorer la performance énergétique de leurs bâtiments, diminuer leurs consommations et réaliser des économies d’énergie. Cette stratégie n’est pas seulement mise en œuvre à travers des primes et des prêts ECORENO mais également grâce à des services d’accompagnement des citoyens dans ces démarches, avec Homegrade et le Réseau Habitat. Y compris dans des quartiers populaires. Huit groupes de travail ont été mis en place avec les différents acteurs concernés pour avancer sur ces matières, qui vont de la Fédération de la construction jusqu’aux interlocuteurs sociaux en passant par les pouvoirs publics, les représentants des locataires et des propriétaires, etc.

A tous les niveaux de ces politiques, dont l’ordonnance climat, l’objectif de justice sociale a été posé parallèlement aux objectifs environnementaux et climatiques. L’un ne se fera pas sans l’autre. Ce que nous voulons, en tant qu’Ecolo, c’est continuer dans cette direction. Comme le dit Zakia Khattabi, notre tête de liste aux prochaines élections régionales, « la question climatique et environnementale est la question sociale du siècle ». C’est en tous cas l’une des questions sociales du siècle.

Pour la rénovation du bâti, un investissement supplémentaire de 350 millions d’euros a été prévu sous cette législature.
Pour la rénovation du bâti, un investissement supplémentaire de 350 millions d’euros a été prévu sous cette législature.

 Les victimes de problèmes climatiques ou environnementaux sont avant tout les plus fragiles. On l’a vu lors des inondations qui se sont produites en Wallonie. On le voit lors des canicules ou encore concernant la pollution de l’air, qui se concentre d’abord dans les quartiers où il y a beaucoup de circulation automobile. Ce sont souvent les mêmes quartiers qui comportent beaucoup d’habitants dépourvus de voiture et qui sont essentiellement des quartiers populaires. Nous voulons offrir des solutions directes pour toutes les catégories d’habitants. L’investissement dans les transports en commun est donc pour nous une priorité absolue. Ceux-ci constituent, avec la marche à pied, le moyen de transport le plus démocratique et le plus ouvert, accessible à tout le monde, tant aux enfants qu’aux personnes âgées, à l’exception des personnes en grande perte d’autonomie. Ils ne nécessitent en outre aucun permis. Nous souhaitons donc poursuivre les investissements massifs en la matière afin d’offrir, à tous et dans tous les quartiers, un droit effectif à la mobilité.

Pour la rénovation du bâti, un investissement supplémentaire de 350 millions d’euros a été prévu sous cette législature pour les politiques environnementales et climatiques bruxelloises. Il faudra encore passer à des niveaux supérieurs pour garantir à tous l’accès effectif au crédit de rénovation, y compris pour des personnes plus âgées ou qui sont propriétaires de leur maison mais n’ont que de faibles revenus. Il faut lever les freins aux investissements qui génèrent des économies d’énergie. On a commencé à faire des choses qui fonctionnent en la matière : le prêt à taux zéro, le prêt ECORENO, mais elles doivent être amplifiées et de nouveaux mécanismes, notamment publics ou associatifs, doivent encore être mis en place. Cela pourrait notamment se faire parallèlement avec un ciblage sur les quartiers les plus populaires où les besoins sont les plus importants, ainsi qu’avec le développement de réseaux de chaleur, de la géothermie ainsi que des pompes à chaleur.

Les effets des politiques bruxelloises de réduction de la production de CO2 sont-ils déjà mesurables? A-t-on évalué si les 60 % des ménages bruxellois qui sont locataires avaient bénéficié d’une façon juste et équitable des politiques d’aide pour l’accès à la rénovation et aux économies d’énergie ?

Les chiffres de réduction de la production de CO2 en région bruxelloise sont encourageants et bien meilleurs que ceux des deux autres régions. Par rapport à 2005, qui est l’année de référence au niveau européen, nous sommes à -27 % d’émissions directes de gaz à effet de serre en région bruxelloise. La réduction est encore plus importante (-35%) dans le secteur du bâtiment, c’est là que s’est produite la diminution la plus forte. Il ne s’agit pas d’estimations, mais d’une mesure constatée de l’évolution de la consommation réelle de gaz et de mazout. De tels chiffres n’ont pas uniquement été atteints à travers des rénovations dans le secteur des propriétaires occupants. En outre, pour la première fois ces dernières années, on a diminué les émissions dans le domaine de la mobilité. Notre politique produit des effets mesurables. Depuis 2005, nous sommes à -27 % d’émissions de CO2 et nous devons atteindre -47 % d’ici 2030. Cela signifie que nous sommes dans la bonne direction, mais qu’il faudra amplifier les politiques environnementales et climatiques.

Il est exact que les locataires n’ont globalement pas vraiment la possibilité d’engager les travaux de rénovation du logement qu’ils occupent. Des instruments existent néanmoins pour le soutien à la rénovation de ces logements, dont des primes ouvertes aux bailleurs, et même aux locataires, qui font parfois réaliser eux-mêmes certains travaux spécifiques. On n’a pas avancé assez vite sur les techniques de conventionnement et on doit progresser à ce sujet : l’idée générale, qu’il faudra faire inscrire dans le prochain accord de majorité régionale pour amplifier le soutien public à la rénovation aux bailleurs – et donc indirectement à la facture énergétique et au confort des locataires – doit être que celui-ci doit être conditionné à un conventionnement qui engage le bailleur à respecter la grille de loyers régionale. C’est le cas pour les logements mis en location dans le cadre des Agences immobilières sociales (AIS), qui accèdent déjà aux primes pour les rénovations lourdes. Il faut avancer dans cette direction, même si ce n’est pas aisé dans un contexte où certains partis sont opposés à l’idée de grilles de loyers, estimant que le marché s’autorégule de façon optimale par son libre jeu. C’est une vision idéologique déconnectée du réel, qui ne permet pas de garantir l’accès au logement, ni a fortiori à un logement ayant des performances énergétiques décentes.

Sous cette législature, il y a eu une mesure d’incitation forte (mais temporaire) à l’amélioration des performances énergétiques ciblée sur les logements à très faible PEB donnés en location : le blocage de l’indexation de leurs loyers. Est-ce un type de mesure que vous défendez pour l’avenir ?

C’est une mesure que nous avons soutenue. Nous avons fait de la rénovation des passoires énergétiques une obligation légale à atteindre d’ici dix ans. Notre enjeu, c’est désormais d’y arriver et d’aider tout le monde à y arriver en utilisant au mieux l’argent public. Cela doit être notre priorité. D’une part, parce que c’est dans cette partie du bâti que la rentabilité des travaux en termes d’économies d’énergie est la plus grande. D’autre part, parce que c’est là où vit le public le plus précaire. L’avantage du blocage de l’indexation des loyers des passoires énergétiques, c’est que ça constitue une sérieuse motivation pour le bailleur à engager des travaux et à améliorer le PEB de son bien. Nous ne voulons cependant pas non plus qu’il y ait des augmentations subites de loyers, ce qui a été le cas lorsque l’on a levé le blocage temporaire de leur indexation. Ce type de blocage ne peut pas être indéfini. Au moment où on le lève, c’est douloureux pour le locataire. Il faut donc bien réfléchir au calibrage de ce genre de mesure. On l’a soutenue sous cette législature, dans un contexte où une très forte augmentation des prix du gaz avait causé l’explosion des factures d’énergie des locataires, en particulier de ceux qui logeaient dans un logement à faible PEB. Il semblait extrêmement injuste de leur imposer en même temps une forte augmentation de leur loyer. C’était d’autant plus injuste que cette indexation du loyer n’avait pas de véritable justification économique. Même lorsque la propriété du bien du bailleur est liée à un prêt consenti pour son achat, les remboursements de celui-ci ne sont généralement pas liés à l’index mais sont stables ou évoluent légèrement, proportionnellement bien moins que l’indexation. L’indexation des loyers constituait donc un enrichissement sans cause pour les bailleurs. Est-ce qu’une mesure de ce type fait encore sens aujourd’hui ? Je n’ai pas de tabou à cet égard. Je pense qu’il faut l’étudier et vérifier qu’elle répond toujours bien à son double objectif : garantir le droit au logement pour tous et faire rénover les biens, à commencer par les passoires énergétiques.

Près de la gare du Midi, un nouveau centre de jour mixte qui offrira des repas, une douche et un espace de repos aux personnes dans le besoin.
Près de la gare du Midi, un nouveau centre de jour mixte qui offrira des repas, une douche et un espace de repos aux personnes dans le besoin.

Vous êtes également le ministre de l’Action sociale et de la Santé…

Ça a été un choix politique et un choix de cœur de revendiquer l’exercice de ces compétences. Lors de la législature précédente, ces compétences étaient divisées dans les mains de cinq ministres bruxellois différents. Nous avons tout rassemblé dans les mains d’un seul cabinet en promouvant une gestion intégrée des politiques sociales et des politiques de santé. Ce qui fait écho au fait que les publics qui ont le plus de problèmes de santé sont souvent les plus précaires, et que ces problèmes sont souvent intriqués. Cela nous a conduit à adopter le premier « plan social/santé  intégré » de la région, qui a pour ambition de promouvoir la coordination et la transversalité entre ces secteurs. Un autre aspect de ce plan est la « territorialisation » de l’action dans ces matières, qui part du principe que l’on doit la fonder sur l’analyse des besoins locaux spécifiques des populations.

Nous avons par ailleurs drastiquement renforcé les moyens mis à disposition du secteur social/santé bruxellois. Il n’y a jamais eu autant de moyens qui y ont été consacrés en région bruxelloise. On est passé de 40 à 55 maisons médicales soutenues. On a porté à 942.000 le nombre d’heures de soin à domicile (+70.000 heures). Pour la politique d’aide aux sans-abri, on a doublé les budgets et le nombre de solutions apportées : on est passé d’un budget de 34 millions d’euros à 73 millions…

La région n’a cependant pas diminué par deux le nombre de ses sans-abri…

Là où on progresse, c’est sur le sans-abrisme « classique ». On a augmenté les solutions de housing first, qui ont triplé au cours de la législature. On a augmenté l’habitat accompagné, les dispositifs de post-hébergement dans les maisons d’accueil, pour accompagner les personnes lors de leur sortie, etc. Sauf concernant les places supplémentaires ouvertes pendant la période hivernale (« buffers hivernaux »), l’accueil dans ces structures d’urgence se fait désormais 24 heures sur 24, alors qu’avant elles mettaient les gens à la rue le matin. On a également mis fin à la politique du « thermomètre », qui voulait qu’on ne mette à disposition que très peu de places d’accueil d’urgence durant la belle saison et qu’on renvoyait tout le monde à la rue durant cette période. C’est terminé, des places d’accueil ont été créées 12 mois sur 12. Un master plan commun pour l’ensemble du secteur a été adopté, ce qui était inimaginable il y a quelques années. Tout cela produit des résultats en matière de sans-abrisme.

Il y a cependant deux problèmes qui nous empêchent d’atteindre notre objectif de « zéro sans abri ». Il s’agit, d’une part, de la pénurie de logements accessibles. On a desserré un verrou en la matière. Je suis très fier d’avoir beaucoup poussé et obtenu, alors que ça ne figurait pas dans l’accord de majorité, que le gouvernement instaure une obligation faite au secteur du logement social de réserver un pourcentage de ses attributions de logements au public qui est à la rue, tout en prévoyant un accompagnement social spécifique. C’est une décision qui a enfin été adoptée il y a quelques semaines. L’autre problème auquel on est confronté, c’est le statut, au regard de leur droit de séjour sur le territoire, d’une partie des personnes se trouvant aujourd’hui à la rue ou dans des centres d’accueil d’urgence. Il s’agit majoritairement de personnes sans papiers, candidates à l’asile ou bénéficiaires d’un régime de protection internationale mais qui ne sont actuellement pas prises en charge par l’administration fédérale, dont c’est pourtant la mission, Fedasil. Ça représente aujourd’hui des milliers de personnes et un énorme problème. Pour 50.000 à 100.000 sans-papiers que compte la région, assurer un droit au logement est extrêmement compliqué. Ces personnes ont juste le droit à l’aide médicale urgente (AMU), mais pas le droit à travailler, pas les droits aux prestations de Sécurité sociale ni de revenu d’intégration, etc. Avec toutes les conséquences que cela comporte, notamment par rapport au travail au noir, à l’accès aux soins, à la santé mentale ainsi qu’à la santé publique. Les travailleurs sociaux sont confrontés à des situations dramatiques par rapport auxquelles ils ont très peu de solutions à apporter : pas d’accès au revenu d’intégration, à la mutuelle, aux soins de santé « non urgents » etc. La politique d’immigration et d’asile du fédéral a un effet délétère sur la région bruxelloise. A l’échelle du pays, deux tiers des aides médicales urgentes délivrées aux sans-papiers sont dispensées dans la petite région bruxelloise et celles-ci sont plus particulièrement concentrées dans sept à huit communes. Certaines forces politiques ne veulent pas entendre parler de régularisation des sans-papiers. Au-delà des considérations humaines, c’est une position insensée du simple point de vue pragmatique. Laisser autant de personnes sans droits sur le territoire est complètement délétère pour le tissu social ainsi que pour l’économie. Le refus de toute régularisation est une pure position idéologique de droite, non exempte de certains relents racistes. Cela met la cohésion sociale de notre région en péril. Obtenir l’adoption d’une régularisation au niveau fédéral doit être une priorité pour la prochaine législature.

La région bruxelloise semble en difficulté budgétaire. Cela ne sera-t-il dès lors pas compliqué de mener les ambitieuses politiques publiques que vous appelez de vos vœux pour la prochaine législature ? Qu’est-ce qui se fera si Ecolo est dans la majorité régionale et qu’est-ce qui ne se fera pas s’il n’y est pas ?

La prochaine négociation gouvernementale commencera par une négociation budgétaire. Il y a cinq ans, on avait déjà demandé à voir clair sur les perspectives budgétaires pour l’ensemble de la législature et de trouver un accord sur les priorités avec l’ensemble des partenaires. Il a fallu un an pour que nous l’obtenions. Ce cadre budgétaire a par la suite volé en éclat suite aux dépenses qui ont été imposées par les crises auxquelles nous avons dû faire face. Celle du Covid, puis celles des prix de l’énergie et de l’inflation qui en a résulté. Par ailleurs, l’accord de majorité prévoyait une recette nouvelle importante, à travers l’instauration d’une taxe kilométrique intelligente, qui in fine n’a pas été mise en place. L’impact de cette taxe, compensé par une suppression de la taxe de circulation actuelle, aurait été financièrement neutre pour les ménages bruxellois, mais elle aurait permis de faire contribuer aux finances régionales les personnes qui viennent à Bruxelles en voiture, profitent de ses attraits de capitale internationale et de ses emplois, tout en payant leurs impôts en Wallonie ou en Flandre. Le projet de taxe kilométrique intelligente qui figurait dans l’accord de majorité n’était ni parfait ni le modèle promu par Ecolo. Mais c’était le fruit d’un compromis patiemment négocié entre les partenaires de la majorité. Je ne puis que constater qu’en décidant de bloquer la mise en œuvre de cette taxe, le PS a été déloyal à l’accord de gouvernement qu’il avait lui-même négocié en tant que premier parti et qu’il a privé la région d’importantes recettes.

Pour ce qui nous concerne, il est exclu que la négociation budgétaire qui devra s’ouvrir entre les futurs partenaires se traduise par des économies dans les politiques de mise en œuvre d’une transition juste. Des objectifs ont été fixés en la matière et les moyens publics nécessaires doivent y être dédiés, avec une attention particulière pour la justice sociale. Il y a par ailleurs des pistes d’économies potentielles au niveau du fonctionnement institutionnel de la région. Dix-neuf communes, dix-neuf CPAS, six zones de police, trois commissions communautaires en plus de la région, etc. Il y a là un écheveau institutionnel qui a eu un sens historique mais qui ne correspond plus aux moyens, aux attentes et aux réalités des Bruxellois d’aujourd’hui. Est-il normal d’avoir des droits à certaines aides sociales qui diffèrent tellement selon la commune où l’on réside ? Est-il normal d’avoir des taxes aussi différentiées selon les communes ? De payer son entrée à la piscine à un tarif différent selon la rue où l’on habite ? Il faut simplifier et rationaliser cette lasagne institutionnelle au bénéfice des citoyens. Du côté des dépenses, il faudra oser remettre en cause certains « éléphants blancs » régionaux. La région ne peut plus se payer certains grands projets dont l’intérêt est difficilement mesurable. Elle a dépensé beaucoup d’argent pour créer le musée de la Bière dans le bâtiment de la Bourse… c’est une très belle rénovation, mais manifestement ce musée ne trouve pas son public. Faut-il poursuivre le projet de métro Nord, qui risque de coûter cinq ou six milliards d’euros pour créer des solutions de mobilité à Schaerbeek et à Evere, alors que des alternatives pourraient être trouvées à moindre coût et que d’autres besoins en matière de transport en commun sont criants ? Doit-on encore investir dans le musée Kanal d’art contemporain autant que c’est programmé ? Ce n’est pas un mauvais projet en soi, mais il est vraiment très coûteux. Ne faut-il pas en adapter l’ampleur à la réalité des finances régionales ?

Trente pour cent des personnes en situation de pauvreté en région bruxelloise, c’est inacceptable. Il faut faire diminuer ce chiffre significativement. Il faut ouvrir les droits sociaux des personnes, leur mettre le pied à l’étrier. Par ailleurs, il faut impérativement atteindre nos objectifs environnementaux, mettre en œuvre la transition juste, développer le réseau de transports en commun. Enfin, nous devons soutenir le tissu économique de la région, avec des PME, des commerces de proximité, de l’industrie et de l’artisanat urbain, etc. Il faudra faire des choix et c’est sur ce type d’objectifs prioritaires que nous souhaitons recentrer les moyens de la région.

Du côté des recettes, outre l’instauration d’une taxe kilométrique intelligente, l’idéal serait d’obtenir, à l’occasion d’une négociation institutionnelle, qu’une partie de l’impôt des navetteurs soit payée à la région dans laquelle ils travaillent. La situation actuelle est notoirement défavorable à la région bruxelloise, qui ne bénéficie pas des moyens qui correspondent à son activité et à ses responsabilités de capitale.

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