dossier élections 2024

Emplois de qualité ou jobs mal payés : qui défend quoi ?

La question de l’emploi révèle immédiatement un ordonnancement des partis selon un axe gauche-droite. Avec cependant, selon les sujets, parfois des surprises ou des nuances.

A l’analyse des réponses que nous avons reçues, une première surprise apparaît : tous les partis francophones disent défendre l’indexation automatique des salaires et des allocations, MR y compris. C’est plutôt dans les réponses des Engagés ou de DéFI que l’on trouve des ouvertures sur des « limitations de l’indexation » ou des « limitations de leur impact sur les entreprises ». On se souviendra cependant qu’en 2014 le MR s’était déjà présenté aux élections en déclarant par la voix de son président  : « C’est très clair, nous ne souhaitons pas toucher à l’indexation. La priorité pour nous c’est exactement l’inverse de cela puisque l’on veut augmenter le pouvoir d’achat des personnes qui ont des bas revenus et des moyens revenus, pour soutenir la relance économique ». (1) Quelques mois plus tard, le gouvernement fédéral dirigé par Charles Michel avait néanmoins imposé un saut d’index. Quoiqu’il en soit, il faut en prendre acte : le MR ne fait pas sa campagne électorale sur la suppression de l’index ou sur des sauts d’indexation.

Le MR, partenaire privilégié d’une majorité N-VA ?

Quant aux réponses aux autres questions, il faut constater que le MR imprime sa différence en se marquant à droite toute… si pas en se positionnant déjà comme le partenaire francophone privilégié pour un gouvernement fédéral où la N-VA exercerait un poids prépondérant, comme ce fut le cas pour la coalition « suédoise » (NVA-MR-CD&V-VLD) de 2014 – 2018. En effet, alors que tous les autres partis francophones qui nous ont répondu se positionnent clairement contre une régionalisation d’une partie de la Sécurité sociale ou de la formation des salaires, le MR est le seul à éluder la question en indiquant qu’il souhaitait « que chaque compétence soit exercée par l’entité la plus efficace et la plus adaptée ».

Le MR imprime sa différence en se marquant à droite toute

On observe le même type de polarisation sur des sujets comme le fait de soumettre l’ensemble des personnes mises au travail dans le secteur privé marchand au paiement de cotisations sociales, le fait d’assimiler les travailleurs de plate-forme à des salariés ou de procéder à une opération de régularisation des sans-papiers. Tous les partis s’expriment, parfois avec des nuances, en faveur de ces mesures, sauf le MR qui marque nettement son opposition.

Sur la lutte contre les « travailleurs pauvres » et la mise à l’emploi dans des sous-statuts, le MR est également le seul à prôner ouvertement une extension des statuts précaires. Pour les libéraux, ils faut développer l’intérim, le travail étudiant, l’économie dite « collaborative » (c-à-d les faux indépendants). Les Engagés quant à eux ne prennent pas position sur les sous-statuts et se contentent de prôner l’octroi de réductions fiscales pour les travailleurs pauvres. DéFI se dit prêt à « une évaluation » des emplois atypiques tandis qu’Ecolo, le PS et le PTB indiquent leur souhait de vouloir mieux encadrer, combattre ou supprimer ce type de mise à l’emploi.

Pour ce qui est d’offrir aux personnes mises au travail par les CPAS dans le cadre de l’article 60 des conditions de rémunérations identiques à celles autres travailleurs qui occupent le même type de poste, tous les partis y semblent favorables (même le MR) à l’exception des Engagés, « pas en faveur de la rémunération identique à celles des autres travailleurs dans le cadre de l’article 60».

Titres services, voitures de société...

Concernant la suppression de l’exonération fiscale sur les voitures de société, certains partis y sont nettement favorables, comme Ecolo ou le PTB, d’autres y sont plus ou moins favorables, fut-ce de façon progressive, comme le PS, DéFI ou les Engagés. Le MR y est, quant à lui, totalement opposé : « il ne peut être question d’ouvrir un débat sur la suppression des voitures de société  ».

Concernant le système des titres-services, seuls Ecolo et DeFI semblent nous rejoindre dans la volonté de faire plus largement supporter le coût des aides ménagères par les utilisateurs plutôt que par les pouvoirs publics. Notamment, dans notre esprit, pour pouvoir investir dans un système d’aides familiales organisé par les pouvoirs publics, offrant de meilleures conditions de travail et ciblé sur un public fragilisé. (2) Le PTB et le PS ont sur ce point centré leurs réponses sur l’amélioration des conditions de travail des personnes occupées dans le cadre des titres services, en éludant la question d’une diminution de la prise en charge de ces prestations par les pouvoirs publics. Les Engagés sont quant à eux explicites : « il ne peut être question de diminuer le financement public des titres-services ». Tout comme pour les voitures de société, le MR n’est en cette matière-là manifestement demandeur d’aucune économie de la part des pouvoirs publics. Au contraire, il propose « d’étendre les titres-services à l’accueil et au transport des enfants âgés de 3 à 12 ans » et même « d’étudier l’extension du système de titres-services à d’autres secteurs directement liés à l’aide et à la simplification de la vie quotidienne des personnes ».

(1) RTBF, 23 mai 2014

(2) Lire notre dossier : « Titres-services : une domesticité subsidiée », Ensemble ! n°107, mai 2022.

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